François Durovray, ministre des Transports : "Il faut un dialogue plus fourni entre donneurs d'ordres et entreprises de transport"
Au soir du mercredi 13 novembre 2024, devant quelque 250 personnes réunies dans une salle comble aux Jardins de Saint-Dominique, dans le cœur de Paris, l'OTRE a clôturé son rassemblement annuel. Une habituelle table ronde était notamment organisée, pour éclairer les adhérents sur le sujet de la complémentarité entre donneurs d’ordre et entreprises de transport. Mais le temps fort de la soirée était après. Alexis Gibergues, président de l'OTRE, et François Durovray, ministre délégué chargé des Transports, se sont succédé sur scène. Ce dernier est notamment apparu souriant et parfois un peu taquin pour faire rire l'audience.
Une période tendue
Dans son traditionnel discours, Alexis Gibergues a commencé par insister sur les difficultés que connaît le secteur du transport depuis deux ans, dues notamment à la forte inflation touchant "l'ensemble des postes de coûts des entreprises".
Le président de l'OTRE a fait part des nombreuses inquiétudes pour ses adhérents : "Alourdissement de la fiscalité du carburant, hausse des cotisations patronales, baisse globale des CA, forte évolution du coût des assurances, a-t-il listé. Les contraintes s'alourdissent et le manque de visibilité à moyen et long terme pèsent sur le moral, l'activité et la qualité de vie au travail."
François Durovray a confirmé le contexte difficile : "Nous sommes dans un moment complexe lié aux difficultés économiques du pays, budgétaire de l'État, etc. En dépit des difficulté légitimes que vous avez, je partage ma confiance en l'avenir du transport. Le transport nécessite un dialogue plus fourni entre donneurs d'ordres et entreprises de transport."
Le PLF 2025
Alexis Gibergues a directement interpelé le ministre des Transports, le mettant en garde sur le PLF 2025 : "Si nos entreprises ont conscience des efforts qu'elles devront fournir en raison de la situation des finances publiques, elles n'accepteront pas des mesures dont les impacts seraient dévastateurs."
Le ministre lui a répondu dans son discours : "J'aimerais rappeler que dans le PLF 2025, le gouvernement a fait le choix de conserver la TICPE. Quant à la suppression de la déduction forfaitaire spécifique (abattement d'une partie des cotisations et contributions sociales, ndlr), j'ai saisi la ministre du Travail sur cette question et j'ai bon espoir que les dispositions prévues dans le PLF soient revues pour tenir compte des spécificités de votre secteur."
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Revaloriser le transport et les revenus
Le président de l'OTRE a appelé de ses vœux une "juste revalorisation des opérations de transports, une claire application de l'indexation gazole en pied de facture, un strict respect des délais de paiement, et une lutte contre les prix abusivement bas." Sur ce dernier point, il souhaite un renforcement du code des transports et des actions de la DGCCRF. Il a aussi préconisé un affichage obligatoire des prix sur les bourses de fret. "Tout ce travail doit également conduire à assurer des revenus décents et fixes pour les transporteurs routiers", a-t-il justifié.
Sur ce sujet, le François Durovray a assuré "comprendre les préoccupations" d'Alexis Gibergues. Il poursuit : "Cela nécessiterait des modifications législatives. C'est un sujet qui mérite d'être traité et je m'engage à voir comme faire évoluer ces idées. Mais, dans le contexte actuel, il est difficile de faire évoluer le droit dans notre pays."
Le ministre a ajouté qu'il a "demandé un plan d'action global pour étudier un certain nombre de pratiques sur le transport routier, comme le cabotage, le travail dissimulé, le tonnage de certains véhicules, etc." Avant d'ajouter : "Nous travaillons sur cette question pour pouvoir faire des opérations coup de poing et espérons qu'elles auront des effets."
La transition énergétique
Sur la transition énergétique, François Durovray a concédé que les 130 millions d'euros alloués au transport en 2024 pour l'électrique "restent insuffisants compte tenu des enjeux", sans pour autant annoncer un nouveau montant pour les années à venir. Le ministre souhaite par ailleurs une simplification des dispositifs d'appels à projets.
Il s'est en revanche affiché contre les sanctions qui ne font que sanctionner : "Les industriels sont engagés dans cette transition. La réglementation doit être adaptée et ne pas précéder la technologie. C'est la technologie qui doit gouverner. La responsabilité des élus, à partir du moment où la technologie existe, est de favoriser son émergence."
Réinsistant sur l'engagement de l'OTRE pour la transition énergétique, Alexis Gibergues a placé une petite banderille sur les écotaxes régionales comme en Alsace, dont il estime "qu'elles ne sont pas et ne seront jamais la solution."
Avant de conclure : "Le transport routier est indispensable à la vie économique et sociale du pays. C'est peu dire que le secteur est en souffrance, et pourtant il ne réclame pas de vivre sous perfusion, d'aides de l'État. Il souhaite simplement mieux vivre de son travail, qui doit être rémunéré à sa juste valeur."
Le ministre des Transport a de son côté conclu en pointant du doigt la nécessité de rénover les infrastructures routières françaises, qui sont "réputées mais vieillissantes". Il a annoncé le début d'une conférence nationale sur le financement de la mobilité à partir de février 2025, pour "trouver les voies et moyens pour augmenter la part de la nation sur le financement de ces infrastructures, afin de financer une trajectoire lisible dans la durée. On ne peut pas vivre au rythme des à-coups liés aux difficultés des budgets et plans de relance."