Décarbonation : pourquoi l’électrique est la meilleure solution selon Carbone 4

L’électrification du transport longue distance n’est plus une hypothèse, mais une trajectoire qui s’impose selon Carbone 4. Dans sa dernière publication, le cabinet de conseil spécialiste des enjeux énergie et climat a analysé les différentes options et leur pertinence pour permettre au TRM d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Selon ce rapport, les camions à batteries représentent la solution la plus viable, malgré les défis à relever en matière d’infrastructures et de disponibilité énergétique.
L’hydrogène et les biocarburants : des alternatives limitées
Parmi les alternatives au diesel, Carbone 4 met, dans un premier temps, en évidence le rendement énergétique très faible de l'hydrogène. L’étude estime, en effet, que les pertes lors de la production, du stockage et de l’utilisation dans le véhicule nécessitent trois à quatre fois plus d’électricité que pour un camion électrique à batterie. De plus, le coût du camion hydrogène reste nettement supérieur à celui de l’électrique, en raison de nouvelles technologies encore peu matures, sans compter les infrastructures de ravitaillement encore quasi inexistantes.
Autre alternative potentielle au gazole : les bioénergies d’origine durable. Bien qu'intéressantes, elles souffrent, selon le cabinet d'étude, d’une disponibilité limitée. La demande en biomasse étant déjà forte pour d’autres secteurs (agriculture, industrie), leur production ne pourra couvrir qu’une fraction des besoins du transport (moins de 10 % des besoins énergétiques du parc en 2050). À terme, ces carburants seront principalement réservés aux transports où l’électrification est impossible, comme l’aérien ou le maritime.
D’un point de vue économique, le coût total d’exploitation (TCO) des poids lourds roulant à l'électrique puis à l’hydrogène dans un horizon plus éloigné deviendront les alternatives les plus rentables. "Dans les conditions économiques actuelles, les TCO (centimes / tonne.km) les plus élevés correspondent aux camions roulant à l’hydrogène (10,6) et aux e-fuels (7), à l’inverse de l’électrique (5,2)", souligne Carbone 4. Le TCO des motorisations à batteries devrait même passer à 3,4 en 2040.
Projection de l'évolution du TCO (cts/tkm) des différentes motorisations pour un tracteur routier. ©Carbone 4
Autonomie, recharge, coûts : les défis de l’électrique
Si l’électrification du transport longue distance est la piste la plus prometteuse, plusieurs conditions doivent être réunies pour accélérer son développement. Carbone 4 identifie trois leviers majeurs. Tout d'abord, l’augmentation de l’autonomie : actuellement limitée à 350 km en moyenne, elle devrait atteindre 800 km d’ici 2033, grâce aux progrès des batteries et à une meilleure efficacité énergétique des camions.
Le rapport met également en lumière la nécessité d'accélérer le déploiement des infrastructures de recharge : l’Europe prévoit d’installer des bornes ultra-rapides tous les 60 km sur les grands axes et tous les 100 km sur les autoroutes secondaires d’ici 2030.
Enfin, la baisse des coûts d’acquisition et d’exploitation sera indispensable pour les transporteurs. Le cabinet de conseil rappelle d'ailleurs que, malgré un investissement initial plus élevé, les camions électriques bénéficient d’un coût de l’énergie plus bas et de frais de maintenance réduits. À long terme, cette tendance rendra l’électrique plus compétitif que le diesel.
Une transition à anticiper
S'appuyant sur ces analyses, l’étude projette que les camions électriques pourraient représenter 30 % des ventes en 2030 et 90 % du parc en 2050. Cette évolution suit également les ambitions des constructeurs, qui visent plus de 40 % de camions électriques vendus dès 2030.
Scénario possible d'évolution du parc roulant de tracteurs routiers longue distance en vue d’atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050. ©Carbone 4
Fort de ce constat, Carbone 4 insiste sur la nécessité d’anticiper dès maintenant cette transition. D'autant que plusieurs arguments plaident en faveur d’un passage progressif à l’électrique. À commencer par le cadre réglementaire de plus en plus contraignant : la stratégie nationale bas carbone (SNBC) prévoit une réduction de 45 % des émissions des poids lourds d’ici 2030 et de 90 % d’ici 2040. Les restrictions sur les énergies fossiles vont donc se renforcer. De plus, les transporteurs vont être confrontés à une attente croissante des chargeurs en faveur de solutions bas carbone pour leurs flux logistiques.
Mais pour le cabinet de conseil, les transporteurs ne pourront pas assumer seuls le coût de cette transition énergétique. Raison pour laquelle une refonte de l'organisation du TRM (délai, logistique, etc.) ainsi qu'une mutualisation des surcoûts doivent être envisagées avec les chargeurs pour favoriser l’intégration des modes décarbonés.
"Cela peut par exemple se traduire par des contrats sur plusieurs années pour amortir le coût d'acquisition des tracteurs alternatifs, avec une indexation du prix de l'électricité comme cela est fait actuellement pour le prix du diesel, ou par l'installation de bornes de recharge sur le site du chargeur afin d'effectuer une recharge partielle durant la livraison", indique l'étude de Carbone 4.