L'Iricc, nouveau dispositif pour verdir durablement les carburants

Avec l’Iricc, la France s’apprête à tourner la page de la Tiruert, la taxe incitative qui poussait les distributeurs à incorporer une part croissante d’énergie renouvelable dans les carburants. Si ce mécanisme a accompagné l’émergence des biocarburants au cours de la dernière décennie, le gouvernement estime qu’il ne suffit plus à répondre à l’impératif de décarbonation rapide des transports.
En cause, notamment, un manque de lisibilité sur les objectifs à long terme et l'absence de hiérarchisation environnementale entre les carburants.
Dans un contexte de révision des objectifs européens en matière d’énergies renouvelables, l’État veut donc remplacer ce système fiscal par une incitation réglementaire fondée sur trois types d’objectifs : une réduction annuelle de l’intensité carbone des carburants, des niveaux d’incorporation d’énergies renouvelables par filière, et des quotas minimums pour les biocarburants avancés et l’hydrogène renouvelable ou bas carbone.
Un périmètre élargi à tous transports
Contrairement à la Tiruert, qui ne visait que les carburants routiers, l’Iricc couvrira également les carburants utilisés dans les secteurs maritime, fluvial et aérien, ainsi que le GNV et le GPL. Une bonne nouvelle la filière gaz carburant qui pointait du doigt sa mise à l’écart du précédent dispositif.
Chaque distributeur se verra assigner des objectifs spécifiques selon le type d’énergie qu’il met à la consommation. Objectif : refléter la diversité des usages et tenir compte des performances environnementales de chaque filière.
Les carburants produits à partir de matières premières en concurrence avec l’alimentation (dits "de première génération") continueront d’être plafonnés à 7 % de la consommation. Les biocarburants avancés (issus de déchets ou de résidus) et les carburants de synthèse bénéficieront, eux, d’un traitement préférentiel.
Un mécanisme fondé sur des certificats et des pénalités
L’atteinte des objectifs de l’Iricc devra être justifiée par la production de certificats de réduction d’intensité carbone. Ces certificats reposeront sur des flux physiques et comptables vérifiés via le registre en ligne CarbuRe, déjà utilisé dans le cadre actuel.
En cas de manquement, des pénalités financières seront appliquées. Elles seront différenciées selon les objectifs : 700 euros par tonne de CO₂ non évitée, 40 euros par gigajoule manquant pour les carburants classiques, et 80 euros pour les biocarburants avancés ou l’hydrogène renouvelable.
Des trajectoires fixées jusqu’en 2035
L’un des apports majeurs de l’Iricc est d’instaurer une trajectoire pluriannuelle, censée apporter une visibilité aux acteurs de la filière. L’objectif est de réduire de 14,5 % l’intensité carbone des carburants d’ici 2030, pour atteindre 25 % en 2035. Ces réductions seront portées pour moitié par les carburants eux-mêmes, l’autre moitié relevant de l’électrification et de l’évolution des usages.
Des paliers annuels sont ainsi fixés : 5,9 % dès 2026, 10,6 % en 2030, jusqu’à 18,7 % en 2035 pour les carburants du transport routier. Des sous-objectifs sont également prévus : les biocarburants avancés devront représenter 1,95 % de la consommation d’énergie des transports en 2030, et l’hydrogène renouvelable ou bas carbone 1,5 %, sans application du double comptage.
Une ouverture à la concertation jusqu’au 10 juin
Le ministère de la Transition écologique a lancé une consultation publique ouverte jusqu’au 10 juin 2025. Cette phase vise à recueillir les avis des acteurs économiques, des collectivités, et du grand public sur les modalités du dispositif.
Les parties prenantes sont notamment invitées à se prononcer sur la pertinence des objectifs par filière, le niveau des pénalités, ou encore la fongibilité entre les différents vecteurs énergétiques. Un webinaire est également prévu le 20 mai pour présenter les grandes lignes du mécanisme.