Un café avec… Céline Vidili, DRH de Stef Transport France
Le Journal du Poids Lourd : Pouvez-vous nous présenter la branche ressources humaines du groupe Stef ?
Céline Vidili : Nous avons une organisation décentralisée pour favoriser la proximité avec les équipes sur le terrain. Le groupe réunit 22 000 collaborateurs (dont 14 500 en France) dans huit pays d'Europe occidentale : France, Belgique, Angleterre, Pays-Bas, Espagne, Italie, Suisse et Portugal. Près de 500 personnes de l'équipe RH y sont réparties. Il y a une volonté d'être sur le terrain pour renforcer le lien social. Les équipes jouent aussi un rôle dans le déploiement de l'ambitieuse politique RSE du groupe.
JPL : Quel est le rôle des responsables RH chez Stef ?
C. V. : Nous en avons dans l'ensemble de nos filiales, qui assurent le recrutement, l'intégration des collaborateurs, la formation… Ils accompagnent les directeurs de filiale sur plusieurs aspects clés : gestion disciplinaire, respect de la réglementation, santé et sécurité au travail. Ils déclinent la politique sociale du groupe en l'adaptant aux spécificités locales. Ce sont des acteurs clés dans l'animation de nos relations sociales.
JPL : Quid du turnover annuel pour le groupe Stef en France ?
C. V. : Il est de 14 %, ce qui est inférieur à la moyenne de 20 % dans le secteur. Le turnover concerne majoritairement trois métiers qui attirent des profils convoités et engendrent une concurrence accrue entre les entreprises : agent de quai, préparateur de commandes et conducteur, qui comptent pour 72 % de nos effectifs.
JPL : Chaque année, vous réalisez plusieurs milliers de recrutements. Comment allez-vous chercher tous ces nouveaux salariés ?
C. V. : Stef effectue en effet 4 000 recrutements par an, dont 3 000 en France pour accompagner la croissance du groupe, remplacer les départs, etc. Nous recevons environ 10 000 candidatures spontanées, qui couvrent 20 % de nos recrutements. Nous diversifions nos sourcings en travaillant sur différents leviers : les réseaux sociaux, nos relations avec les écoles, des partenariats, etc. Depuis 2023, nous collaborons avec l'agence de reconversion du ministère des Armées, ce qui nous a permis de recruter sur divers postes.
JPL : Quels sont justement les besoins actuels en recrutement du groupe Stef ?
C. V. : Nous désirons renforcer nos équipes de production en CDI et les fidéliser. Nous parlons plus facilement de tensions sur ces ressources que de pénurie. En 2024, nous avons recruté plus de 600 conducteurs. Ils sont pour nous les ambassadeurs de la marque auprès des clients du groupe, et au cœur de notre démarche qualité. Et puis, le métier de conducteur est méconnu et requiert un grand nombre de qualifications : conduite, mais aussi réglementation, qualité, environnement… Tout cela s'acquiert par des formations pointues et une expérience terrain importante. Depuis 2021, notre propre école de conduite nous permet de mieux attirer et former de nouveaux talents. Nous pouvons réaliser des campagnes de recrutement plus étendues afin d'attirer des profils habituellement sous-représentés, notamment des femmes.
JPL : La formation permet-elle aussi de faire évoluer vos collaborateurs au sein du groupe Stef ?
C. V. : Nous sommes pleinement engagés dans le développement des collaborateurs, quel que soit leur poste. La promotion interne est un vrai pilier de la politique RH du groupe. En France, près de 80 % de nos managers en sont issus. C'est un marqueur fort qui nous différencie d'autres entreprises. Nous avons mis en place une offre de formation complète : écoles de conduite, de quai et de préparateur de commandes. Et à l'avenir, nous avons la volonté d'avoir une école technique.
JPL : Le groupe Stef ne cesse de s'agrandir en Europe, avec des acquisitions en Angleterre, Belgique et aux Pays-Bas, par exemple. Quels impacts ces rachats ont-ils d'un point de vue humain ?
C. V. : En 2024, nous avons accueilli 1 800 collaborateurs liés à des acquisitions. C'est très riche d'un point de vue professionnel. Ces intégrations exigent une forte capacité d'adaptation, tant en termes de culture managériale que de réglementation propre à chaque pays. C'est un défi permanent.
JPL : Comment les résultats du groupe influencent-ils votre travail année après année ?
C. V. : L'impact des résultats peut nous amener à ajuster nos priorités. Les échéances et objectifs à court terme peuvent évoluer selon la situation de l'entreprise. Mais de manière générale, nous conservons le cap à long terme de notre stratégie RH, même dans les situations plus difficiles sur le plan économique. C'est un vrai atout majeur pour nous de pouvoir être dans la continuité. Mais c'est évidemment plus simple de travailler quand tout va bien !
JPL : Quel a été votre parcours avant d'accéder au poste de DRH Transport ?
C. V. : Je suis un pur produit Stef, issue de la promotion interne, hormis deux années dans le bâtiment et les travaux publics. Originaire de Metz, j'ai effectué la majorité de mon parcours dans l'Est. J'ai intégré le groupe sur un parcours de découverte métier avant de rejoindre l'équipe RH. J'ai été assistante RH, responsable RH de plusieurs filiales, responsable recrutement/formation, DRH région Grand Est… Après 17 ans d'expérience dans cette région, j'ai pris la direction des ressources humaines des activités logistiques France à Paris, avant d'élargir mes responsabilités pour occuper mon poste actuel. Cela fait un total de 25 ans dans le groupe Stef.
JPL : Quelle a été la période la plus challengeante pour vous ?
C. V. : Le métier de RH, c'est d'être toujours au croisement des besoins stratégiques de l'entreprise et des attentes des collaborateurs. Cela nous confronte en permanence à des enjeux multiples et complexes, même si certaines périodes sont plus marquantes que d'autres. Si je devais en retenir une, ce serait la Covid-19, particulièrement intense et difficile, comme dans beaucoup d'entreprises. Ça correspond aussi à l'année où j'ai changé de poste, ce qui a apporté une dimension personnelle au challenge. La période a montré la résilience des équipes RH et notre capacité à nous adapter et à accompagner les collaborateurs, restés mobilisés pendant cette période, dans ce contexte inédit.
JPL : Souhaitez-vous jouer un rôle actif dans la féminisation du secteur du transport ?
C. V. : Oui, j'ai à cœur de faire bouger les lignes, surtout parce que je suis convaincue que la mixité est un levier de performance et d'attractivité pour l'entreprise. En 2021, le groupe Stef a lancé une démarche ambitieuse pour la mixité et l'égalité professionnelle, avec pour objectif d'atteindre 25 % de femmes dans nos effectifs d'ici 2030. Nous en sommes à 22 %, nous avons donc bien progressé. Cette dynamique inclut les conductrices notamment, avec un enjeu double : attirer plus de femmes dans ce métier historiquement masculin et les y maintenir durablement. Aujourd'hui, elles représentent 4,67 % des conducteurs chez Stef. C'est un travail de fond.
JPL : Sans transition… Pour vos points d'équipe, êtes-vous plutôt du matin avec café et viennoiseries, ou du soir avant un petit verre entre collègues ?
C. V. : Plutôt du matin, avec le café et les viennoiseries ! Les réunions du matin sont les plus constructives et les plus efficaces.
JPL : Quelle musique vous aide à vous motiver avant un entretien ou une réunion importante ?
C. V. : Pour me donner de l'énergie, j'aime la musique rock. J'avoue que je ne me renouvelle pas beaucoup… J'écoute les Pixies depuis toujours. Si je devais retenir une chanson, ce serait Where is my mind ? J'aime la mélodie qui est à la fois intense et douce.
JPL : Si vous deviez occuper un autre métier spécifique au poids lourd, quel serait-il ?
C. V. : C'est une bonne question. Je ne me vois pas exercer un autre métier que celui lié aux ressources humaines. Les raisons sont multiples : mélange de passion pour le développement des personnes et des organisations, variété des fonctions, développement d'un large éventail de compétences… C'est un métier passionnant et exigeant !